Il est là !
Marcel Caron, ispx (président de la CCIS)
Québec, décembre 2020
Le peuple qui marchait dans les ténèbres
a vu se lever une grande lumière. (…)
Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné !
Isaïe 9, 1,5
À chaque année, lors de la messe de minuit, quand ces mots résonnent, une grande émotion m’envahit, peu importe si je me trouve dans la plus belle des cathédrales, une paroisse ordinaire de chez-nous ou dans un obscur salon communautaire dans une haute montagne de Colombie. Lorsque ces paroles me rejoignent, j’ai toujours la nette impression que quelque chose change pour notre monde.
Et pourtant, le monde aura-t-il changé en sortant de cette messe de minuit ? Cette année, si la neige tombant tout doucement voudrait nous faire croire qu’elle vient habiller notre monde de son beau manteau de pureté et d’innocence, nous peinerons à y croire. L’année 2020 est passée sous le signe de la mort et de l’angoisse de la Covid-19, frappant le monde de plein fouet et bousculant tous nos projets. Au lieu de se relever, nous voilà submergés de vague en vague… et nous attendons le fameux vaccin qui nous sortira de cet horrible cauchemar.
En écrivant ces lignes, je viens d’apprendre que les autorités gouvernementales et sanitaires ont annoncé que chacun sera invité à vivre Noël sans rencontre de famille et d’amis, cherchant à se protéger les uns et les autres d’une infection qui nous guette tous. Nous attendons avec impatience cette fameuse piqûre qui nous permettra de retrouver un semblant de normalité. Mais est-ce le vaccin qui sauvera le monde ?
Et si c’était l’Enfant qui sauvait le monde ? Si c’était Lui qui venait nous injecter sa joie et son espérance en ces jours si sombres pour le monde ? En regardant des photos de mes petits-neveux sur Facebook, en écoutant des capsules vidéo de familles qui préparent Noël en famille, la joie et la confiance des enfants m’émerveillent. Ces enfants m’invitent tout simplement à retrouver l’Enfant intérieur qui veut naître en moi, en chacun de nous. Peut-être est-ce Lui, le cher Lui, qui viendra me rappeler qu’il est « Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix » (Is 9, 5)… et alors tout peut changer !
Il naît pour toi, pour moi, pour nous
Jésus, l’Emmanuel, le Dieu-avec-nous, nous accompagne à chaque moment de notre histoire. Il est là avec nous, au cœur de la pandémie, pour nous redire que l’amour aura le dernier mot. Il est là dans nos joies et nos tristesses pour nous aviser qu’il est présent à tout instant de notre vie. Il est là dans le petit et le pauvre pour nous enseigner que la véritable richesse se trouve au niveau du cœur !
Ce Noël plus silencieux, plus solitaire, nous invite à entendre avec une nouvelle radicalité la promesse du Sauveur ! Il est là ! Il naît pour toi, pour moi, pour chacun des nôtres ! En faisant de notre cœur une crèche où il veut naître, il vient confier à tous les membres des Instituts séculiers une grande mission : être pour le monde le lieu de l’incarnation de l’Évangile ! Comment y arrivons-nous ? Je vous propose trois pistes pour ce temps de Noël…
Accueillir son mystère dans un profond silence, voilà la première piste. Plus que jamais, ce Noël nous convoquera à la méditation profonde du grand mystère de Jésus. Le Fils de Dieu est là ! Comme à Bethléem, le silence de la nuit enveloppe notre grotte intérieure. Et c’est dans ce silence que nous pouvons accueillir la promesse, comme les bergers : « Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur » (Lc 2, 11).
En faisant silence, nous pourrons plonger dans la profondeur de son amour pour toute personne… mais d’abord dans cet amour personnel qu’il a pour moi, pour toi, pour chacun de nous ! Comme il est important d’entendre le Sauveur nous redire son amour personnel pour chacun et chacune de nous ! Car c’est parce que nous nous savons aimés que nous pouvons le partager !
Annoncer avec courage apostolique cette bonne nouvelle de l’Amour est la suite logique. Impossible de garder cette bonne nouvelle seulement pour nous ; il faut la partager à tout prix. Les bergers ont été les premiers disciples de cet Enfant. « Ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant » (Lc 2, 17). Aujourd’hui, notre monde a faim et soif d’espérance. Et la source de l’espérance, c’est l’Enfant de la Crèche.
Annoncer Jésus Christ est à la portée de chacun et de chacune. Notre témoignage personnel est une porte d’entrée… mais cela ne suffit plus ! En écoutant le cri de nos frères et sœurs, en discernant leur faim et leur soif d’espérance, nous sommes invités à reconnaître que Jésus est déjà là dans leur vie. Mais présentons à notre tour, tout humblement, la source qui soutient notre propre vie. Osons dire le nom de Jésus ! Osons chanter « la gloire et les louanges de Dieu » (Lc 2, 20) pour que d’autres puissent avoir le désir de cette rencontre qui change tout. Et montrons-leur le chemin qui conduit à l’Auteur de la Vie.
Finalement, nous sommes appelés à construire un monde nouveau selon le projet de l’Emmanuel : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour ses bien-aimés » (Lc 2, 14). Dans un monde si divisé, si polarisé – souvent même dans nos propres familles ou Instituts – nous sommes appelés à être ces artisans de paix. Le monde nouveau que Dieu offre commence à surgir lorsque nous devenons ces hommes et ces femmes capables de placer la deuxième pierre pour la construction d’un monde nouveau. Car la pierre angulaire, c’est Lui, le Prince de la paix ! Il est là… et nous promet un monde meilleur.
Mais chacun et chacune, avec son talent, son don et son charisme, viendra placer la pierre de sa vie pour construire un monde plus humain, plus juste, plus fraternel. Que cette promesse de vie se réalise au jour le jour lorsque chacun et chacune apporte sa part pour bâtir la civilisation de l’Amour.
Ces pistes toutes simples nous convoquent sur le chemin de Bethléem… Le Bethléem de 2020 – en terre sainte – est derrière le mur de la honte. La pandémie en a érigé d’autres, partout dans le monde. Mais cette année, osons croire que l’Étoile brillera encore plus fort, plus intensément, pour annoncer la Bonne Nouvelle : Il est là ! Il vit en toi, en moi, en nous ! Et cette lumière percera tous les murs pour éclairer un nouveau jour qui naît !
Au nom des membres du conseil exécutif de la Conférence canadienne des Instituts séculiers, je vous souhaite un très Joyeux Noël et une bonne, heureuse et sainte année 2021. Que l’Enfant de la Crèche nous comble de sa joyeuse espérance pour pouvoir la communiquer à tous ceux et celles qui croiseront notre route au long de la nouvelle année !