Pâques, souffle de l’Esprit
Marcel Caron, ispx (président de la CCIS)
Message de Pâques, 2024
photo©Pixabay
Le printemps jaillit en moi et la vie et le bonheur,
Aujourd’hui mon âme est douce comme une gerbe de fleurs,
Aujourd’hui ma vie éclate en mille et mille couleurs
Le Christ est dans mon coeur!
Glory, glory, alléluia.
Ces mots, nous les avons chantés tellement souvent qu’en les lisant la mélodie nous revient spontanément à l’esprit. Certains penseront à André Daigneault qui les a écrits il y a près de 60 ans. Pour d’autres, ces mots les transporteront à une rencontre ou un congrès où Dieu est venu toucher leur coeur. Pour d’autres encore, ils les liront pour la première fois... en se disant que cela ressemble à Pâques! Avec les Jours Saints que nous venons de vivre, nous sommes invités à laisser éclater la joie du Ressuscité au cœur de nos vies.
Mais trop souvent, nos vies sont affligées par l’ombre d’un Vendredi Saint qui plane sur nous. Les guerres de l’Ukraine et de Gaza nous perturbent... car ce qui devait être des opérations-éclairs, voilà qu’elles perdurent et le compte des victimes nous glace le sang. La souffrance de nos proches nous afflige tout autant en les voyant s’enfoncer dans la tristesse devant les problèmes de santé physique ou mentale ou encore les tempêtes dans leur vie de couple; nous voilà impuissants. En Église, les fruits de nos efforts ne sont pas au rendez-vous et l’avenir de nos paroisses et de nos communautés inquiètes. Et pourtant ...
À l’aube du matin de Pâques, il y a plus de 2000 ans, le Christ est sorti victorieux de son tombeau! Plus encore, il vient planter dans nos cœurs l’étendard qui s’agite sous le souffle de l’Esprit pour confirmer que nous sommes tous et toutes appelés à la Vie nouvelle! Personne n’est jamais plus condamné à la mort. Aucune situation personnelle ou sociale n’est hors de la portée du Christ ! Et donc, la miséricorde du Père s’impose comme la lumière bienfaisante qui éclaire nos pas dans la construction du Royaume !
C’est bel et bien ce que le Christ a annoncé par toute sa vie. « Depuis qu’il est venu, en nous tout a changé. ». Le Royaume a pris naissance et s’est déployé sur notre terre et en chacun de nous comme la fleur qui s’ouvre sous le chaud soleil du printemps. Mais Pâques ne peut pas être un simple rappel d’un événement historique dans un jardin de Jérusalem. Pâques est davantage une interpellation, un cri de ralliement qui saisit le cœur et la vie de chacun, chacune. C’est une certitude que notre vie ne sera jamais plus sous l’emprise du mal! La vie qui jaillit en Jésus, le Christ, jaillit aussi pour toi, pour moi, pour toute l’humanité.
Vivre Pâques, sous le souffle de l’Esprit
Au jour de Pâques, personne ne reconnaît le Sauveur. Marie-Madeleine le prend pour le jardinier; Cléopas et son ami le considèrent un «étranger». Même après plusieurs apparitions où Jésus a pris le temps de parler avec les siens, de partager un repas, de se laisser toucher par eux, au moment de l’Ascension, «ils eurent des doutes» (Mt 28, 17). Pas facile alors de chanter: « Glory, glory, alléluia ! »
Cependant, malgré les doutes et les incohérences des siens, Jésus continue de proclamer, par sa présence de Ressuscité, la victoire sur les ténèbres. Comme au premier jour lorsque Dieu tira la création du chaos, l’aube de Pâques inaugure une nouvelle naissance pour toute l’humanité. Le souffle de l’Esprit nous donne de croire à la sainteté qui s’installe, car c’est le grand désir divin. Au-delà de nos péchés, de nos fragilités et faiblesses, Lui qui a tout pris sur la croix, nous invite à commencer une vie nouvelle. La page sur notre passé est tournée à tout jamais...
La vie de l’Esprit alors commence lorsque nous entreprenons une véritable relation avec Dieu en lui laissant toute la place à l’intérieur de nous. Dans ce coeur-à-coeur, où nous nous mettons à l’écoute de sa Parole, nous refaisons l’expérience du prophète Élie sur l’Horeb. Ayant surmonté les angoisses et les tristesses, ayant dit à Dieu qu’il se sentait seul, abandonné et que la mort semblait l’unique voie de sortie, le prophète reconnaît Dieu qui se révèle dans la brise légère du soir. Après les incendies, les ouragans, les tremblements de terre, Dieu arrive dans le doux murmure du vent. On est loin des bourrasques qui ont fait trembler les colonnes du Cénacle, mais cette brise légère rappelle les pas de Dieu au jardin d’Éden qui cherche l’homme: « Où es-tu? » (Gn 3, 9). Et dans ce premier dialogue, les bases d’une confiance grandissante sont établies pour continuer à avancer jour après jour.
C’est dans cette prière intense et personnelle que nous entendrons l’interpellation de Dieu: « Allez, de toutes les nations faites des disciples.. » (Mt 28, 19). Nous sommes tous et toutes envoyés au monde. Car la vie dans l’Esprit nous habilite à faire une annonce bouleversante: celle du kérygme! Le pape François résume en quelques mots cette proclamation qui a le pouvoir de changer une vie: « Jésus Christ t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant il est vivant à tes côtés chaque jour pour t’éclairer, te fortifier, te libérer. » Ayant accueilli ces mots, les répétant comme un refrain qui surgit de notre coeur, nous pourrons l’annoncer fidèlement... et y croire passionnément!
Cette annonce provoquera - sans doute - un renouvellement de l’espérance. Dans une tension eschatologique, les croyants et croyantes sont invités à s’insérer au cœur du monde pour y apporter une nouvelle vision.
« Amour et fidélité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » (Ps 85, 11). C’est dans l’action du quotidien, avec les gestes les plus ordinaires, que nous serons capables de nourrir l’affamé, secourir le malade, accueillir l’étranger, etc. Et dans la beauté des petites choses, l’éternité sera semée ... Celle-ci germera et donnera des fruits abondants parce que des hommes et des femmes auront fait le pari d’aimer avec « un peu plus d’amour que d’ordinaire ».
En ces jours de Pâques, voilà donc l’invitation qui est faite aux membres des Instituts séculiers, mais aussi à tous les baptisés: vivre sous le souffle de l’Esprit ! Le Père, qui s’est refusé à ce que la mort ait le dernier mot sur son Fils bien-aimé, nous regarde avec la même tendresse. Le cœur brûlant de cette découverte qui change notre vie, nous voilà résolument sur le chemin de la rencontre, désirant une seule chose: que tous connaissent, aiment et servent le Christ Ressuscité.
Invités-es à se lancer dans la danse de l’amour, Pâques nous donne la certitude que l’Esprit vaincra toutes nos peurs, transformera nos désarrois en tremplins d’engagement et nous fera entrer dans une vie plus belle, plus donnée.
Voilà notre unique espérance !